dimanche 30 octobre 2016

« Pas avant le mariage » — comment l’éthique sexuelle biblique m’a convaincu

Beaucoup de choses ont été écrites ces derniers jours sur la culture du viol en lien aux horreurs dans les résidences de l’Université Laval et sur le cas de Gerry Sklavounos. C’est dans ce contexte que ma réflexion anecdotique s’articule.
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« Pas avant le mariage » - Grandir comme jeune chrétien
En grandissant comme jeune chrétien, l’éthique sexuelle que tu reçois se résume, de façon simpliste, à « pas avant le mariage ». Se soumettre à un commandement du type « tu ne tueras point » est assez facile, parce que la logique est évidente. Mais, c’est dure d’être un ados plein d’hormone et de se soumettre au « pas avant le mariage », d’autant plus quand on ajoute la frustration de ne pas comprendre la logique du commandement. Je veux bien me soumettre, Dieu, mais pourquoi? Même si les débordements abondent dans la société, il y a un grand nombre de gens qui ne sont pas abstinents et qui mènent des vies sexuelles fidèles et responsables qui correspondent grosso-modo à l’idéal biblique d’une seule chair (i.e., l’unité dans la fidélité, la mutualité et la vulnérabilité).
Utiliser l’autre comme un moyen?
Le Viol de Tamar   - Eustache le Sueur (1640)
Un de ces jours, je parlais avec quelqu’un que je connais (et qui n’est pas chrétien) d’une possibilité de relation qu’il avait avec une fille très désirable. Il était embêté parce que son intérêt envers la fille était purement sexuelle. Il savait que si il sortait avec, ce n’était vraiment pas parce qu’il avait ses besoins à cœur. Après discussion, on en a convenu qu’il valait mieux qu’il ne se mette pas à la fréquenter, puisqu’il n’aurait servi que ses propres désirs égoïstes, plutôt que de servir les besoins de la fille en question.
Après coup, j’ai réalisé que c’était exactement la logique du « pas avant le mariage ».  
Dire « pas avant le mariage » c’est confondre la conduite automobile avec « pas dans le fossé »
Que tu comprends la logique du commandement, tu réalises aussi que la terminologie « pas avant le mariage » n’est pas adéquate et n’exprime en rien la vision biblique des relations hommes-femmes --- cela ne parle qu’en termes négatifs.
Donc l’éthique chrétienne sexuelle ne se résume pas à « pas avant la mariage » mais à « une seule chair » (Gen 2:24) - ce qui connote le développement (la culture!) de l’intimité et du soin de l'autre comme si il formait ton propre corps! Cela prend place par l’intendance et la préservation de sa propre intimité en vue de la réserver pour ce qu’on ne partagera avec personne d’autre (i.e., « pas avant la mariage »).
Bref, résumer l’éthique sexuelle chrétienne par « pas avant le mariage » c’est comme confondre la conduite automobile avec « pas dans le fossé » : le commandement négatif est en place que pour permettre la possibilité de se rendre à quelque part en sécurité.  Tu peux être une seule chaire avec quelqu’un seulement dans la mesure où tu réserves ton intimité (émotionnelle, sexuelle, etc.) pour celle-ci.

« Devenir une seule chair », la culture du viol et mon rôle comme homme là-dedans
Je ne dois pas prendre ce qu’il y a de plus précieux et le plus vulnérable chez l’autre sans m’engager à donner ce qui m’est le plus précieux et mon plus vulnérable. Un tel acte intime doit nécessairement être protégé par l’alliance du mariage, un contexte d’engagement total devant Dieu dans lequel l’un comme l’autre peut être vulnérable autant émotionnellement que sexuellement. « Devenir une seule chair », c’est l’engagement absolu à prioriser le « nous » plutôt que le « je ». Je reconnais qu’on peut tout autant être égoïste à l’intérieur d’un mariage, mais vous comprenez mon point.
C’est relié à la ‘culture du viol’ en au moins une chose : le viol prend l’acte qui unit un être à l’autre de la façon la plus intime et symbiotique, et le pervertit en l’acte le plus égoïste, le plus dommageable et le plus fracturant. La culture du viol, c’est en partie la consécration de l’égoïsme, du « je ». Comment puis-je satisfaire mes propres besoins en prenant autrui comme mon moyen? Tandis que de réserver l’intimité sexuelle pour le mariage, c’est au moins un premier pas vers la consécration des besoins de l’autre, la consécration du « nous » — être une seule chair, chérir et prendre soin de l’autre comme de son propre corps.
Mon idée n’est pas de dire « si les femmes faisaient ceci ou cela, cela ne leur arriverait pas. »
Mon idée, c’est de m’incriminer moi-même comme homme, et de me dire « moi je ne chercherai jamais à obtenir le plus précieux chez une femme si je ne suis pas prêt à donner le meilleur moi-même, et à chérir et à protéger notre nous ». Dans le contexte du mariage, le mari est commandé « d’aimer sa femme comme Christ a aimé l’Église » (indice : Jésus fut crucifié sur une croix pour l’Église). En d’autres mots, la façon dont le mari est appelé à vivre sa vie de couple, c’est de mourir à lui-même pour servir les besoins de sa femme. Avec leur humanité fragile, les disciples de Jésus se sont exprimés : « Si telle est la condition de l'homme à l'égard de la femme, il n'est pas avantageux de se marier! » (Matt 19:10). Évidemment, que ce n’est pas avantageux! Mais le mariage n’a jamais été à propos de s’avantager soi-même. J’oserais dire, n’importe quelle relation ne devrait pas avoir pour but de s’avantager!
Quelques mitigations ad hoc
Mon but n’est pas non plus de regarder de haut mes lecteurs non-croyants (si j’en ai!), mais simplement d’exprimer que la Bible et ses commandements ont une logique (qui m’a convaincu et me convint). Je ne veux pas non plus dresser une faux fossé entre l’éthique sexuelle biblique et les comportements responsables de la plupart des gens. Ultimement, l’éthique chrétienne est pour ceux qui sont nés de nouveau (i.e., qui sont chrétiens).
On me dira « attend d’être marié et tu verras que ce n’est pas parfait, voire cent fois pire » et on me citera des mariages d’horreur. Mon but est simplement de dire que le mariage n’est pas tant une destination qui rime avec perfection, mais le contexte d’un éternel réengagement à prioriser le « nous » plutôt que le « je ».

 Grâce et paix! 
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Quelques nouvelles et requêtes de prière
Le temps file à vive allure et je suis quelque peu en retard sur l’écriture de ma thèse de maitrise. Tout bien pesé, tout va bien.
Requêtes de prière: (1) discipline, passion, acuité intellectuelle et équilibre (copine, vie d’église); (2) sagesse et direction pour la transition après-séminaire (doctorat, oui-non-où? Etc.); (3) grandir en grâce et connaissance de notre Seigneur et Sauveur.
Merci de m’avoir lu. Merci de vos prières et de votre support.

« À celui qui peut vous préserver de toute chute et vous faire paraître devant sa gloire irrépréhensibles et dans l'allégresse, à Dieu seul, notre Sauveur, par Jésus Christ notre Seigneur, soient gloire, majesté, force et puissance, dès avant tous les temps, et maintenant, et dans tous les siècles! Amen! »
Jude 24-25


Marc-André

dimanche 16 octobre 2016

La nudité et la ruse, connaitre et être connu - quelques réflexions

Les deux premiers chapitres de la Genèse présentent un portrait de l’existence humaine comme elle devait être.  Le dernier verset des scènes de la création montre l’homme et la femme heureux et comblés, et leur nudité est « très bonne », sans honte. Ils peuvent tout ce qu’ils sont l’un avec l’autre sans n’avoir rien à cacher.
No Shame - Anthony Falbo

Genèse 2:25
« L'homme et sa femme étaient tous deux nus (aroumim),
et ils n'en avaient point honte.
Le serpent était le plus rusé (aroum) de tous les animaux des champs, que l'Éternel Dieu avait faits. Il dit à la femme: Dieu a-t-il réellement dit: Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin? »

Le « rusé » serpent apparait. L’agencement de « rusé » et « nus » (aroum — aroumim) est un jeu mot avec leur son quasi-identiques.
Qu’est-ce que cela indique?
Les notes de la Bible NET mentionnent: « l’idée semble être que l’intégrité de l’homme et de la femme est le focus de la ruse du serpent. Au commencement ils sont nus et il est rusé, par la suite ils sont habillés et il est maudit. »

Genèse 3:6-11
« 6 La femme vit que l'arbre était bon à manger et agréable à la vue, et qu'il était précieux pour ouvrir l'intelligence; elle prit de son fruit, et en mangea; elle en donna aussi à son mari, qui était auprès d'elle, et il en mangea.
7 Les yeux de l'un et de l'autre s'ouvrirent, ils connurent qu'ils étaient nus, et ayant cousu des feuilles de figuier, ils s'en firent des ceintures.
8 Alors ils entendirent la voix de l'Éternel Dieu, qui parcourait le jardin vers le soir, et l'homme et sa femme se cachèrent loin de la face de l'Éternel Dieu, au milieu des arbres du jardin.
9 Mais l'Éternel Dieu appela l'homme, et lui dit: Où es-tu?
10 Il répondit: J'ai entendu ta voix dans le jardin, et j'ai eu peur, parce que je suis nu, et je me suis caché.
11 Et l'Éternel Dieu dit: Qui t'a appris que tu es nu? Est-ce que tu as mangé de l'arbre dont je t'avais défendu de manger? »

Après avoir mangé le fruit défendu, le couple réalise sa nudité et essaie de la couvrir en se faisant des ceintures de feuilles de figuier, et ils se mettent à avoir peur de Dieu à cause de cette nudité (3:10).

Par la ruse du serpent, l’homme et la femme allait chercher à être rusé (3:6), mais ils allaient découvrir qu’ils étaient nus devant Dieu (3:7, 10).

La honte apparait avec la connaissance de la division entre l’humanité et Dieu et entre la division de l’homme et de la femme. La nudité est rendue impossible. Ils ne peuvent plus être qui ils sont : ils doivent se couvrir, même avec des feuilles de figuier pathétiques.
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Garden of Eden - Eyvind Earle
Je reviens très souvent aux premiers chapitres de la Genèse, parce qu’ils sont d’une richesse incroyable. C’est l’histoire d’Adam et Ève, mais c’est aussi mon histoire dans la mesure où les mêmes choix me sont présentés sur une base quotidienne. Je méditais cette semaine sur la signification du jeu de mot entre nudité et ruse.

Ce qui fait que le serpent est rusé, c’est qu’il attaque précisément là où l’on est le plus vulnérable. Qu’est-ce qui peut être plus destructeur que de semer la désunion entre l’homme et la femme, et entre l’humain et Dieu?

Beaucoup de choses sont communiquées dans ces images... et beaucoup de choses m’échappent pour l’instant. J’y réfléchis. Entre temps, Dietrich Bonhoeffer offre quelques pensées intéressantes :

« La honte exprime le fait que nous n’acceptons plus l’autre comme étant le cadeau de Dieu, mais plutôt que nous sommes consumés par un désir excessif pour l’autre; associée à ceci est la connaissance du fait que l’autre personne n’est plus satisfaite de m’appartenir, mais désire obtenir quelque chose de moi. La honte est une couverture dans laquelle je me cache de l’autre à cause de ma propre méchanceté et de celle de l’autre personne, c’est-à-dire à cause de la division qui s’immisce entre nous. Là où une personne accepte l’autre comme une aide qui est un partenaire donné par Dieu, là où cette personne est contentée en se comprenant-elle-même-comme-étant-tiré-de et destinée-pour-l’autre en appartenant-à-l’autre, là les êtres humains n’ont point honte. Dans l’unité d’une obéissance parfaite, un être humain se tient nue devant l’autre, non-couvert, révélant corps et âme, et n’est pas honteux. La honte apparait seulement dans un monde divisé. La connaissance, la mort, la sexualité — la relation entre ces trois mots primaires de la vie est ce dont il est à propos ici et dans la suite. »
(Dietrich Bonhoeffer, Creation and Fall: A Theological Exposition of Genesis 1–3, 101–102).

Heureusement, l’histoire n’arrête pas ici. L’Éternel leur fournira des vêtements adéquats (3:21). Puis en Christ, nous sommes une nouvelle humanité : « Ne mentez pas les uns aux autres, vous étant dépouillés du vieil homme et de ses œuvres, et ayant revêtu l’homme nouveau, qui se renouvelle, dans la connaissance, selon l’image de celui qui l’a créé » (Col 3:9-10).

Quelques nouvelles et requêtes de prière
Ouf, le temps file! Déjà à la moitié du semestre. Mes études progressent très bien. Bonne nouvelle, pas de nouvelle? 
Requêtes: (1) discipline, passion, acuité intellectuelle et équilibre (copine, vie d’église); (2) sagesse pour la transition après-séminaire (doctorat, oui-non-où? Etc.); (3) grandir en grâce et connaissance de notre Seigneur et Sauveur.
 Merci beaucoup de m’avoir lu. Merci de vos prières et de votre support.

Marc-André

dimanche 2 octobre 2016

"Tout va dont bien mal" - Le cynisme et l'espérance


Le cynisme et l’espérance
Il y a beaucoup de choses qui peuvent pousser à la déprime: le terrorisme, les enjeux écologiques, le climat politique, aurais-je un bon emploi un jour? Pourrais-je prendre ma retraite? Etc.
D’autres choses poussent à l’indignation: pourquoi autant de guerres, de morts? Pourquoi la Syrie?
Pour les croyants, à cela on ajoute la quantité incroyable de blasphèmes entendue quotidiennement, et la direction opposée que prend la société en relation avec la morale chrétienne.
Ceci peut mener à un genre de cynisme ou de scepticisme à propos de l’état du monde.
The Sun - Yue Minjun (2000)
Mais le scepticisme, qui prend une apparence de lucidité, est une forme d’arrogance et d’orgueil. L’un de mes profs, Darrell Bock, dit que le scepticisme fonctionne comme une paire d’œillères: il empêche de voir ce que Dieu est entrain de faire. C’est une chose de s’autocritiquer, c’en est une autre d’être sceptique.
Pour ceux qui suivent Christ, la vie est vécue à l’ombre des événements à venir. Les chrétiens vivent dans « les derniers jours » depuis la résurrection du Christ (e.g., Actes 2:17; 1 Pi 1:20; 1 Cor 10:11; 1 Tim 4:1; 2 Tim 3:1; Héb 1:1-2; 9:26; 1 Jn 2:18).  Peut-être que le scepticisme ou l’hédonisme ou le cynisme devrait être une réaction normale (logique) quant aux événements se déroulant autour de nous, mais pour les chrétiens la fin est déjà connue: Jésus a gagné. La mort est morte. Les forces des ténèbres seront jetées dans l’étang de feu. Vivre en sachant que Christ a vaincu libère du cynisme, du scepticisme ou de l’hédonisme, parce que tu sais précisément où l’histoire se dirige : vers la consommation des âges où Christ sera souverainement élevé et où à son nom tous genoux fléchira dans les cieux, sur la Terre et sous la Terre. 
Le résultat est une assurance paisible, « la paix de Dieu qui surpasse toute intelligence » (Phil 4:7). Vivre à l’ombre de la fin des temps libère des réactions cyniques, sceptiques, hédonistes, à-plat-ventristes ou autres -- et cette libération donne l’espace nécessaire pour vivre comme Jésus. Le Seigneur s’est soumis totalement au Père pour accomplir son plan. Un plan qui en l’apparence n’avait pas l’air très gagnant. Mais c’est précisément par sa mort que Jésus a transformé le plus grand en le plus grand bien : la résurrection d’entre les morts et le pardon des péchés.
Dans un monde qui semble nous pousser au cynisme (ou à autres choses), il faut « garder les yeux sur Jésus, le pionnier et le perfectionneur de [notre] foi » (Héb 12:2). Jésus est le pionnier de notre foi d’abord parce qu’il est notre sauveur, mais aussi parce qu’il est l’exemple ultime de ce qu’est être fidèle à Dieu. En tant que ‘perfectionneur’ (oui, j’ai vérifié, c’est un mot!), il est celui qui nous rend capable de reproduire sa fidélité à Dieu.
Et donc le cynisme ou le scepticisme cède sa place à l’imitation du Christ, ce qui est une contribution beaucoup plus positive à notre monde actuelle que de désespérer quant à son état et à se paralyser à l’écart de l’action... ou de désespérer... ou de critiquer sans fin... ou d'abandonner... 
Je ne dis pas que le deuil, l’indignation, la frustration ou le découragement momentané n’a pas sa place. Il y a un temps pour tout sous le soleil.  Il faut se lamenter quand nous sommes affligés. Mais avec la résurrection de Jésus et l’assurance de son retour, c’est l’espérance qui nous permet d’enlever les œillères d’un cynisme perpétuel ou de l'aigrissement de l'âge, et qui nous permet d’être ouverts à ce que Dieu est entrain de faire, et d’y participer.

Quelques nouvelles et requêtes de prière :
(1) On m’a décerné une bourse d’étudiant pour la Société de théologie évangélique (ETS). ETS est une organisation professionnelle et académique regroupant des chercheurs, pasteurs, enseignants et étudiants en études bibliques à l’intérieur du monde évangélique. Le but d’ETS est de servir Jésus-Christ et son église en facilitant la recherche biblique évangélique. Concrètement, ceci veut dire que je gagne 4 nuits à l’hôtel, le prix d’entrée de la conférence et des livres.
(2) Je travaille présentement sur la présentation d’un dossier pour obtenir une bourse d’études au Québec. La date limite est le 18 octobre. Ceci occupe beaucoup de mon temps, mais c’est aussi connexe avec ce que je fais au séminaire pour ma thèse et certains travaux de session.
Requêtes: (1) discipline, passion, acuité intellectuelle et équilibre (copine, vie d’église); (2) applications pour doctorat (choisir où aller? sujet de recherche?); (3) grandir en grâce et connaissance de notre Seigneur et Sauveur.
 Merci beaucoup de me lire de votre support spirituel et matériel indéfectible.
Marc-André